…
« Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d’arrêter les rayons du soleil,
Brave l’effort de la tempête.
Tout vous est Aquilon, tout me semble Zéphyr.
Encor si vous naissiez à l’abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage,
Vous n’auriez pas tant à souffrir :
Je vous défendrais de l’orage ;
Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La nature envers vous me semble bien injuste.
– Votre compassion, lui répondit l’Arbuste,
Part d’un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu’à vous redoutables.
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu’ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos ;
Mais attendons la fin. »
…
Trek 73 kms, Amuse gueule …
Le départ claque dans l’air déjà chaud qui laisse présager une belle nuit étoilée. Steve à la baguette, gère cette introduction d’une main de maitre et nous ramène dans le paquet de tête. Les bénévoles de l’AT1 nous tendent les cartes et tous les orienteurs du groupe de tête se jettent dessus comme si personne n’avait jamais vu du 1/50.000. La navigation commence rapidement car il faut s’extraire de la zone péri urbaine. 400Team prend rapidement les commandes et nous ne pouvons que tenter de nous accrocher. Les postes se succèdent avec une précision étonnante au vue de l’échelle. J’évolue entre deux eaux, l’envie de suivre le rythme imprimé par 400team et Capopale et la raison qui me dit d’attendre le reste de l’équipe. La progression ressemble à un ballet de l’opéra, mais le parquet ciré laisse place à de gros blocs de granit caché sous les rodhodendrons. Premier juge de paix, le Carlit laisse deviner son imposante carcasse. Sur notre gauche une équipe fait le choix osé de couper par le col à l’ouest du carlit, Seagate ! Nous marquons le pas dans la difficile ascension du pic où il faut en plus chercher la trace. La redescente n’est guère plus facile et Raidaventure.fr nous rattrapent vite, aguerris qu’ils sont aux terrains montagnards. Nous nous retrouvons également en compagnie d’Issy Absolu et les trois équipes entament jusqu’au petit jour une partie de cache cache entre les blocs. La redescente dans la vallée permet à l’équipe raid 74 de Manu Lang de nous rattraper. Ils sont frais alors que nous sommes déjà dans le dur, je maudis le rythme trop rapide que j’ai voulu donner dès le départ. Petite montée en lacet dans les faillards, et un torrent bienfaiteur où nous trempons les jambes quelques minutes. Nous nous faisons doubler à chaque pause, pas terrible pour le moral et il faut parfaitement se connaître pour réussir à se dire que ça ne compte pas. Nous reprenons la progression en 9° position, et toutes les équipes devant nous font le choix de bifurquer à gauche pour prendre une rampe terrible. Nous restons sur notre premier choix et décidons de passer au col pour adoucir la trace. Le photographe au sommet nous annonce 2ème, certes mais 2ème équipe à passer ne veut pas dire 2ème ! Les 7 autres équipes ont toutes fait le choix de gauche sur les crêtes. On quitte pour quelques temps le gr mais on croise néanmoins des touristes, on se demande vraiment comment ils arrivent à suivre les traces, pas de balisage et pas de cairn, le pyrénéen est un rustique !
Note pour moi-même pour la prochaine fois : dissocier les haribos des bonbons sous plastique, en bouche le mélange est moyen …
Nous croisons un couple au niveau du lac et j’en profite pour m’enquérir de l’identité de l’équipe qui nous précède : « une jolie blonde ou une jolie brune ? » Les randonneurs d’avant nous ont dit qu’ils avaient 15′ d’avance et qu’ils avaient un drapeau français sur le bras, on élimine seagate et 400team, qui devraient avoir déjà 45′ à 1h d’avance à ce stade. « ho ben je ne sais pas, je ne regarde que ma femme » nous lance t il avec le regard approbateur de sa douce juste à côté de lui. Fayot !
Nous arrivons au pied du CP et Seb marque subitement le pas. Nous atteignons le cp et pendant que nous nous collons au contrôle matériel Seb voit le médecin de course. Plie, plie petit roseau … mais ne romps pas ! 1H de perdue mais tout heureux de pouvoir reprendre la course avec un Seb à peu près d’aplomb et un steve en caleçon, nous repartons en compagnie de raid74 dont la féminine n’est pas au mieux non plus.
Et que font deux orienteurs quand ils sont ensemble ?? de la merde messieurs dame, hé oui, n’ayons pas peur des mots ! On trimballe seb en cherchant de l’eau, Stéphanie découvre que je suis à la limite de l’autisme et que ce qu’elle me dit rentre à droite pour ressortir à gauche. Je met ça sur le compte de la déshydratation et hop une source bienfaitrice nous tend les bras, plus d’excuses ! Merci monsieur l’agriculteur qui nous a filé le tuyau !
Derrière ça revient, Nantes et l’équipe Suisse. On se reconcentre, descente raide sous la ligne électrique, on fausse compagnie à Manu car Véréna souffre le martyr sur ces terrains pentus. Et on remonte pleine pente sur le versant d’en face. Stéphanie ne saute pas de joie à l’idée de bartasser mais il y a du kilomètres à gagner. Une petite bataille dans les buis au sommet et presque carreau sur le poste. Nous revenons au contact d’Aquitaine Safety. Ne reste plus que la descente sur le village où nous pourrons prendre de l’eau et avoir une petite surprise. La nuit tombe et le propriétaire chez qui nous avons frappé nous avoue une peu confus qu’il a enlevé une balise ne sachant pas ce que c’était. On rigole bien à l’idée de la ramener à Pascal et on embarque le labrador du type par la même occasion. Le cheminement pour rattraper l’AT n’est pas terrible et nous privilégions un beau mais sûr détour au crapahut dans les bois. 7°, temps bloqué, mais surtout nous allons pouvoir décompter 5h de sommeil et tactiquement c’était le but.
Section raft, vive la reco de juillet !
RIF 2016
Réveil et mise en route rapide, tout juste le temps d’apprendre que les copains de RN46 ont bâché sur des problèmes de pied. On descend en petite foulée, canal ? Pas canal ? On arrive légèrement à la bourre mais on nous annonce heureusement qu’il y a un décalage de 15′. On se prépare vite et deux équipes devant nous ne sont pas prêtes, nous grignotons donc deux places pour partir en 5° position, au cul des Issy Absolu. Stéphanie prend rapidement ses marques et nous barre le raft comme si elle le faisait tous les week ends. Grosse confiance dans l’équipe, et ce n’est pas un ou deux arrêts sur des cailloux qui nous fera douter. Le gros arrive, drossage, triple chute, boule de king kong, tout s’enchaine à merveille, et quand on rate le passage Stéphanie nous sort quand même une super parade. A notre arrivée Seagate rempli ses bidons et s’apprête à partir en vélo, même si c’est un peu tronqué nous savourons de nous retrouver sur la même transition que les champions du monde.
VTT 91 kms, un bon chantier comme on les aime …
La transition s’éternise, on ne sera pas les tops guns de la transition c’est sûr ! On repart enfin et une grosse montée sur le plateau que l’on a fait en trek cet été nous donne le ton de la journée, ça va grimper ! Tout le monde monte bien, puis bascule dans une longue descente très roulante. On remonte en face, les premiers jolis passage et … la première crevaison ! Ou plutôt la valve de ma roue avant qui rend l’âme sans raison. Je perd du temps à essayer de la revisser et décide de mettre une chambre. Ça nous tient bien 10′ en plein cagnard et surtout je dois expliquer à mes belles jantes carbone ce qu’est une chambre, elles n’ont jamais vu ça. On repart, petite source d’eau fraiche, et … seconde crevaison ! Je réalise que j’ai juste oublié de regarder le fond du pneu, et j’y retrouve deux belles épines de buisson noir. Je m’insulte de quelques noms de poules et met une nouvelle chambre. On repart et Capopale ne tarde pas à nous reprendre. Ils ne sont plus que trois mais roulent fort. Ils orientent vraiment bien pour des p’tits jeunes, il est vrai qu’ils ont l’expérience de 2015. On va rester ensemble jusqu’à la grosse remontée sur le vallon d’en face. Là je met Steph à l’élastique pour un gros tractage très optimiste, je paierai l’addition après. Petit replat, pause déjeuner, une brique de soupe pour ma part, c’est simple, c’est bon, le ciel est parfaitement bleu, peu de mots, on est heureux. Quelques centaines de mètres plus loin une source coule sur un lit de mousse, on fait le plein, pas de doute, le « back to nature » est plus que jamais sur la course. La suite est ultra simple en orientation et la nuit ne va pas la compliquer. Seb profite du jour pour crever pour la seconde fois, c’est rageant, on ne crève jamais et là on est déjà à 4. Pendant qu’il répare je commence à rustiner une chambre, j’avais pas fait depuis 30 ans au moins …
On remplit les gourdes dès que possible, on boit comme on n’a jamais bu, la chaleur ne descend pas, sur un rif on ne peut pas avoir des conditions optimum, soit il pleut des seaux et on est limite alerte orange, soit il fait canicule et on brûle. Allez pov’ biquet, arrête de te plaindre et avance, ça changera … On arrive à un cp où nous pouvons manger chaud, je presse l’équipe alors que je suis limite hypo, j’en ai marre de m’arrêter toutes les 5 minutes. 15′ plus tard il faut qu’on s’arrête, tout le monde me cherche à manger. Jean-michel-gros-con vous connaissez ??
Le début de la descente est assez pénible, surtout pour moi qui suis à peine lucide, le guidon m’échappe des mains mais ça me gave d’être le dernier du groupe alors je roule comme un débile et je prend des boites. Mais tuez le, qu’on en finisse, c’est pas possible d’être aussi stupide ! Je me refais la cerise pendant que seb répare sa troisième crevaison, juste avant d’aborder la série d’épingle. Devant Stéphanie nous fait son numéro, heureusement qu’on a une nana qui assure là dedans, ça serait un coup à perdre une bonne demi heure sur cette descente. Steve finit la descente en cassant sa chaine mais on arrive au parking des gorges de la Carança et on aura le temps de réparer à la transition.
Trek 37 kms, ambiance montagne !
Nous prenons deux heures de sommeil avant de nous engager dans les gorges. Aventure évasion n’est pas très loin derrière. Steve a déjà fait la ballade il y a quelques années, un bon prétexte pour lui refiler la carte. Il virevolte de rocher en rocher, nous lâche un pet immonde de temps à autre, il est en forme ! Stéph n’est pas au mieux, elle s’endort, et moi je suis bien content qu’elle ne puisse pas avancer plus vite, je ne suis pas super facile non plus. Le parcours de jour doit être splendide mais nous ferons tout de nuit, jusqu’au refuge. Nous arrivons quand il ouvre, il doit être 6h30 du matin, le jeune qui tient le refuge est sympa et à part Seagate hier soir il n’a vu personne. On lui raconte un peu la course pendant qu’il nous taille 4 sandwiches de bûcheron + 4 jus de pommes …
ha non pardon trois, Steve prend son petit chocolat chaud, et avec son petit regard d’ange j’ai l’impression de courir avec mon fils, c’est tout mignon (t’enflammes pas steve, je suis marié). On repart requinqué avec le jour qui se lève et comme d’hab, en cherchant notre chemin en plein jour on se demande comment ont fait ceux qui sont passés de nuit. Les sommets rosissent, on dirait qu’ils vont s’enflammer. Les cris des marmottes nous font tourner la tête, et quelques izards nous surveillent du haut de leur pierrier. On est bien. Back to nature. Quelle belle idée Pascal a eu d’imposer du sommeil à prendre (presque) où l’on veut et surtout quand on veut. On n’est plus en mode zombie, on profite, c’est presque étrange cette sensation, pour un peu on se sentirait coupable de n’être pas fatigué. Une petite voix intérieur me sussure délicatement « tu veux être fatigué ? Patience ça va venir ! » …
Nous nous trouvons face à un petit dilemme. Suivre les consignes du road book ou suivre son instinct. Pile le road book, face l’instinct. Merde c’est face, comment je vais l’annoncer aux autres ? « bon on va couper par la droite, ça doit passer, le gardien du refuge a dit que c’était cairné » allez zou, on verra bien … On croise deux anciens du gaz, des solides, le genre de mec que l’on veut devenir quand on est riffeur, gros sac à dos de 75 litres, le pantacourt en grosse côte, le pull, le thermos de café,le verbe haut et cet accent pyrénéen si particulier. On profite de leur parfaite connaissance du secteur. « Bonjour, on voudrait aller au pic de la fosca del gégante » « Facile, à droite, à gauche, un cairn, à gauche, à droite, vous êtes arrivés » ok ça a l’air simple, en avant. Au petit col on voit la cabane à atteindre mais j’ai beau dire que le point à atteindre est à 2600, tout le monde me soutient qu’il est à 2800. J’ai appris à me taire depuis quelques temps, on monte donc à 2800 … pour redescendre à 2600 ! bon, l’avantage c’est que ça passait mieux que si on était resté sur la courbe. On prend le poste puis on plonge dans la vallée de l’Orri, une équipe nous colle aux bask’, on croit que c’est aventure évasion, en fait il s’avérera que c’est Issy qu’on a doublé quand ils dormaient à côté du refuge de la Carança.
Il fait chaud, très chaud. On prend de l’eau au refuge de l’Orri et on grimpe au col, dans le cagnard, avec le drone qui nous épie. Le groupe avance bien. La descente qui suit la prise de poste est interminable, pentue, sous le soleil. On arrive à Prat Ballaguer. Le village ne m’est pas inconnu car je voulais venir faire le canyon d’eau chaude juste à côté. Mon esprit est ailleurs, quelque part dans mes vacances d’avant. Steve a semé sa carte au pic du géant, je le soupçonnerai presque d’avoir fait un avion avec. Bref, je lui laisse la seule carte qu’il reste. Il me montre son choix, ok vas y poulet, c’est tout bon. On descend, descend, descend. On arrive à la départementale en bas et là les cerveaux se réveillent. « Putain merde mais on n’a pas le droit ». On cherche un chemin, en vain, on est prêt à se jeter dans les eaux tumultueuses de la têt mais c’est bien du classe IV et y a 500 mètres à faire, c’est couillu. Et on doit bien se résigner à tout remonter ce qu’on vient de descendre. Je crois qu’à ce moment c’est Steph la plus heureuse;)) 300 mètres de positifs plus tard un 4×4 estampillé Raid in france arrive sur nous à fond. Pascal a l’air soulagé qu’on ait pris la bonne décision, il aurait dû nous disqualifier ou nous mettre une grosse péna si on avait été tenté par le diable … On doit remonter un peu sur une grosse piste pour prendre une sente d’enduriste. C’est pas très agréable, on est à quelques centaines de mètres du point que l’on veut atteindre et on piétine. La trace se perd. Je coupe dans le pentu.
A ce moment précis l’équipe va vivre un petit passage qui va cimenter tout le groupe pour le reste de la course. Stéph a mal aux pieds et me fait bien comprendre qu’elle aimerait que je cherche le chemin un peu plus plutôt que de couper de suite dans la bartasse. Je lui dis que je ne m’ennuie pas avec un chemin que je ne trouve pas, il suffit de descendre le thalweg, il est assez propre en plus. On est pas d’accord, ça boude des deux côtés. Seb fait le médiateur. En plus je marche toujours 100 mètres devant le groupe, Seb est habitué mais c’est vrai que c’est pas terrible pour la vie de l’équipe. Bref, à l’arrivée à l’AT on se parle franchement avec Steph. On met tout à plat. Fin de l’épisode, on va pouvoir passer aux choses sérieuses maintenant.
On se commande une petite salade de tomates qui fait plus que du bien mais comme nous sommes toujours aussi mauvais sur les transitions on mange avant de sortir de l’AT alors que l’on avait 2h30 de bloqué pour effectuer l’étape de liaison.
On se décide enfin à repartir, 2h30 pour faire 20 kms de vtt roulant, si nos calculs sont bons on va le faire en 1h et on aura donc 1h30 de sommeil gratuit ! Top top top !! Le problème c’est qu’au rif un plan ne se déroule jamais comme prévu. A peine sorti de l’AT je crève. Ça commence à faire beaucoup, je prend sur moi pour ne pas balancer mon vélo dans la rivière. On répare, on repart. On a pas fait 10 mètres (si si, j’vous jure …) que c’est Seb qui crève. Là je vais vous passer les détails, on a crevé 4 ou 5 fois sur 100 mètres, on a taxé des chambres à air aux espagnols, aux belges, à Christophe Aubonnet, aux spartiates il me semble … Les équipes nous évitent maintenant « ho putain c’est les bleus, ils vont encore nous taxer une chambre ! ». Evidemment on a épluché, réépluché nos pneus, en long, en large, en travers.
Esprit de compétition, es tu là ? Si tu es là, frappe trois coups ! ……… bon, on abandonne ? Allez on décide de pousser tant bien que mal jusqu’au départ de la section. Je regonfle mon pneu arrière (oui puisque j’ai oublié de dire que j’ai une crevaison lente sur le tubeless à l’arrière …) et on repart. On arrive enfin à cette transition. On a mis 2h23 pour faire 20 kms de roulant, on est énervé, stressé, on n’a pas mangé, on n’a pas dormi, on en a marre … Putain de raid de merde. On décide de manger comme il faut et on va déborder sur le temps imparti mais tant pis. On prend le temps de s’équiper pour la nuit et on repart, enfin. On grimpe dans le village, on trouve le sentier qui commence à grimper et … et … ho putain non !! Seb reperce ! Là je demande l’avis à personne, on fait demi tour et puis c’est tout, ça ne sert à rien de s’engager sur cette section sans plus aucune chambre à air de rechange. On revient à l’AT. Que fait on ? Les magasins sont fermés sinon on aurait été à Prades en vélo acheter des chambres. Moi, là le raid j’en ai plus rien à faire. On a crevé déjà 11 fois, j’ai passé 8 rustines qui ne collent pas, on a écumé tout le peloton de leur chambre à air, ça me saoule …
Et là qui c’est qui arrive ? Le gros jipé avec Anto. On leur raconte notre histoire, on leur dit qu’on va abandonner. On se fait in-cen-dier !! Bon calmez vous les gars, on va réfléchir alors et on va peut être pas abandonner après tout. On décide de poser deux heures de sommeil, ça évitera qu’on perde trop de temps. Steve, Steph et moi essayons de dormir un peu. On laisse Seb régler son problème (c’est lui qui crève le plus) et aller de maison en maison à 23h dans un petit village pyrénéen pour chercher une chambre à air 29 pouces. A part le président du club de boules qui peut nous prêter le city bike de geneviève c’est le désert. Alors Seb démonte son pneu, une fois de plus. On l’a fait 100 fois donc ça ne sert à rien d’éplucher le pneu. Par contre on a pas regardé la jante. Seb trouve bien une petite aspérité mais vraiment, c’est tellement insignifiant que ça ne vaut pas la peine. Mais bon, on ne sait jamais, il ponce, met un point de colle pour adoucir l’aspérité et remonte son pneu. 45′ de dodo pour seb, 1h15 de mauvais sommeil pour nous trois, mais on est toujours en compétition et le pneu à l’air de tenir. On repart enfin. Belle grosse bosse qui casse bien les pattes, on pousse un peu mais on en passe pas mal sur vélo. J’ai chaud. La température ne baisse pas, ou peu. Je transpire. En plus je suis le dernier du groupe, j’aime pas ça. Je suis en train d’exploser. Je n’avance plus, j’ai le bide gonflé, j’ai pas ch… depuis le début de la compèt, c’est peut-être ça ? Arrêt caca, je vais passer les détails mais je sais maintenant à quoi sert le couteau du matos obligatoire (réponse uniquement en mp) Seb a fait demi tour ne me voyant pas arriver. Putain, le rôle du boulet c’est dur à tenir, j’ai pas trop l’habitude, je puise au fond. Ça va mieux quelques minutes, la cague magique ? Finalement non, dès que ça monte fort je suis à la peine. On rattrape une équipe qui est parti 1h avant nous, ça ne me redonne pas le moral. Ça monte encore. Seb me tracte. Noooooon, j’espère que Steve va pas prendre de photos ! Faut que personne sache. Mais même en me faisant tracter, les plus grosses bosses sont trop dures à passer sur le vélo. Je pense. Je me façonne un monde intérieur où la fatigue n’existe pas. Et je me repasse en boucle mon leitmotiv. Plie petit roseau, plie … mais ne romps pas !
Nous nous octroyons sur ma demande une micro sieste de 20′. Enroulé dans ma couverture de survie je sombre immédiatement.
Le froid du petit matin nous aide à nous réveiller, il fait humide. Je regarde ma montre, il reste une petite heure de nuit, allez mon gars, bouge ton cul ! Nous repartons et comme par enchantement j’arrive à présent à suivre le rythme. Steph et Steve assure à la carte, Seb leur lit les consignes du road book, et moi je me gère. Cette sensation du mec inutile, je ne sais pas si je l’avais déjà vécu comme ça. Je suis spectateur. Remarque le spectacle est beau. Stéphanie et Steve assurent comme des bêtes en orientation. Ils se complètent à merveille. Quand Steph hésite c’est Steve qui trouve, quand Steve s’arrête c’est Steph qui trouve. Un petit ballet. C’est beau à voir. Je me régalerai presque si je n’étais pas si occupé à lutter pour avancer. Nous redescendons le col et au CP aventure évasion est en train de dormir. Hooooo ce moment magique où la tête décide que tes jambes peuvent tout monter, juste parce que tu as aperçu un numéro de dossard. Le single suivant se fait à fond, l’euphorie nous gagne. Steve descend un peu plus vite que nous. Normal il vient de casser sa durite de frein arrière. Il en faudrait plus pour l’affecter. Il descend à fond. Généreux le type. Pas une plainte. Fataliste. C’est comme ça, il s’adapte. Le coéquipier parfait. Un joli passage dans des gorges sur des passerelles nous réveille un peu, un poste un peu physique qui m’entame à nouveau et la fin de section dure, très dure. Je resombre dans une grande fatigue. Et la fin de la section en plein soleil n’arrange rien. Je réussis à suivre le rythme du groupe mais au prix de gros efforts. Tous les 100 mètres la question à la con « c’est encore loin ? ». Le col. Galamus est là, allez mon gros, et t’as pas intérêt à montrer que tu es fatigué, le médecin de course pourrait bien t’arrêter ! Raté ! J’arrive et je m’écroule au milieu des caisses vélo, tel un gros sac. Là je me souviens que c’était beau, je me souviens que seb m’a forcé à manger deux pots de fruits au sirop, que j’ai râlé parce que j’arrivais pas à les manger, je me souviens que je me suis étendu par terre, je me souviens du ciel. Ha oui je l’ai bien vu le ciel, la position du guetteur aérien. Il était bien bleu. Et puis plus rien.
Je me suis réveillé, j’avais une couverture de survie sur moi, la tête qui tourne un peu. Le médecin m’a demandé si ça allait, j’ai menti. Seb,Steve et Steph m’ont demandé si ça allait, j’ai dit oui machinalement, j’ai fait mon sac et on est parti. Ça allait un peu mieux mais surtout je comptais sur la fraicheur du canyon pour redémarrer. On peut dire pour revivre.
Les premiers pas dans le canyon sont une résurrection. L’impression de faire couler le robinet sur la cocotte minute. La spéléo qui s’enchaine et ses 16 degrés finissent de me requinquer. On a bien mérité un petit sorbet, pause glace à la sortie du monastère. Le jeune qui tient la boutique nous dit que nous ne sommes pas les premiers à lui acheter des glaces par contre nous sommes les premiers à nous installer en terrasse. Malgré toutes ces péripéties nous sommes toujours 6°, 1h30 derrière aventure évasions. Steve nous peaufine l’itinéraire pour monter au cp. Concours de blague, blagues belges contre blagues de steve, Stéphanie ça la fait pas marrer les blagues à Steve, nous non plus mais c’est steve alors on rigole quand même. Révision du répertoire complet de Bali Balo, démonstration de chants paillard, je leur raconte toute la finesse d’une popotte à l’armée, c’est le quart d’heure bucolique du raid. Seb nous recentre sur l’action et lit le road book « suivre une trace de chasseur » … nous y voilà, le rif commence là. Suivre un cairn c’est facile partout sauf sur le rif. Pourtant nous avons l’oeil avisé, deux cailloux empilés = un cairn. Il fait chaud mais nous sommes conscient d’avoir la chance de faire cette section de jour. On bascule de l’autre côté de la montagne par une petite faille rifesque. Je prend le temps de scruter les éléments avant de commencer à descendre dans la merdasse (les buis) et … yes le poste est visible depuis la brèche ! On prend un point de repère et on file le pointer, non sans avoir fait les sangliers à 4 pattes dans les buis avant (« ça passe pas ! » « mais si seb ça passe mais à 4 pattes »).
La suite c’est du bonheur. On peut aller passer notre permis de chasse, on sait trouver une trace de chasseur. Meilleur temps sur la section largement devant seagate et 400team, pour être honnête ils en ont fait une partie de nuit et ça, ça change tout. Tyro, château, descente plein fer, AT.
Dit comme ça c’est simple mais en fait c’était uuuuultra simple. On arrive 2′ avant aventure évasions qui sont partis 1h30 devant nous, le moral il est pour nous. Et les croques monsieur aussi d’ailleurs. Et on va même jusqu’à trouver la proprio de l’épicerie qui était fermé, on lui fait rouvrir pour lui acheter une badoit tiède et des betteraves cuites. Et on se gave. Le figuier de la place du village craque en nous voyant et nous cède ses plus beaux fruits. Et pendant ce temps Aventure évasion fait une transition de fou. Je ne sais pas s’ils sont restés 15′ à la transition. Nous on repart la pense bien pleine, le moral au taquet, on a bien dû rester 45’ mais on s’en tamponne le coquillard. Section vtt d’anthologie. Courte mais tonique. J’ai retrouvé toutes mes jambes (enfin 2 comme tout le monde en fait) et on monte toutes les bosses comme s’il y avait la prime en haut. Steph est loin d’être la dernière et nous déboite sur la moitié des bosses. Fanny dirait que je suis macho mais bon c’est vrai que ça fait quelque chose à son petit égo de mec. Steve est facile. Seb va bien. On va avancer sévère. AT suivante, ce vtt était court, 2h on aura mis. Ça sent la fin, où sont les chantiers ? 6 malheureux kms en trek, 40 petits kms en vtt, 69 en kayak mais c’est la der, merdeeee, on réalise qu’on a finit notre rif ! (Le mec il fait le malin parce qu’il oublie qu’il a vécu 12h où on a cru qu’il était mort) …
Trek 6 kms et son toboggan rafraichissant …
On attaque le lit du ruisseau, on croise le GR, on reste dans le lit puis on emprunte une trace qui fait tantôt rive droite tantôt rive gauche. Seb nous lit le road book, apparemment il faut rester dans le lit du ruisseau. Là je donne mon interprétation, je trouve stupide de rester dans le lit alors qu’on a un chemin à 1m. En fait les consignes sont données pour la seconde partie où ce sera un vrai canyon, on le comprend par la suite. On rattrape Aventure évasion et Intersport, ils sont déjà équipés canyon ! On embraye derrière eux, juste à suivre le cling cling du 8 qui tape sur les mouskifs. Pied du château, j’ai toujours pas compris ce qu’ils ont fait : les deux équipes ne montent pas au château où il y a pourtant un poste et continuent leur progression en direction de l’AT. On s’en fout, on fait notre course, on se mêle de nos affaires. Château de Termes. On admire la ruse de sioux de Pascal « prière de laisser ce poste en place, course d’orientation à destination des enfants » ou quelque chose du style. Malin le Pascal. Un petit passage Rifesque pour atteindre les cordes. On se pose pour commencer à s’équiper. Un grand moment. Steve se rend compte qu’il a oublié son prussik (le gars il est parfait mais faut pas exagérer non plus, il est juste « presque » parfait !). Il a un bout de corde qui pourrait faire un prussik, il faut juste faire les nœuds de pêcheur. Il essaie. Une fois. Deux fois. Trois fois. « Bon allez file la corde à steph, il va te le faire » … héhéhé j’ai la pression mais j’en fais tous les jours des pêcheurs double, c’est moi le chef, tu vas voir ton prussik je vais te le faire en 2 temps trois mouvements. Merde raté, comment on fait déjà ??? Stéphanie m’arrache la cordelette « donnez moi ça les bouffons » (les termes c’est pas tout à fait ça, mais dans son regard il y avait ces mots), elle bricole son nœud et … raté ! bon on est tous des quiches et le guide qui nous regarde faire sans rien dire depuis 10’ doit bien se marrer … ou être inquiet de nous envoyer dans le rappel tout seul !
Enfin en tout cas je ne sais pas comment on a fait mais on arrive tous en bas du rappel nickel et vivant. On descend dans le canyon. Je rappelle à notre aimable auditoire qu’on est parti sans combi, ça ne faisait pas parti du matos obligatoire. Première vasque, on se mouille les genoux. Seconde vasque, on se mouille les couilles (sauf Stéphanie, bien sûr ;)). Troisième vasque, jusqu’au cou. C’est froid, ça mouille, ça crie, des gonz…. Heu … des gens faibles nous sommes. La dernière vasque c’est le top. Toboggan obligatoire, c’est la tournée du patron. Oublié le coup de chaud de la nuit dernière !
Reste juste à remonter à l’AT, manger, dormir nos deux dernière heures, couchés à côté d’Aventure évasion. On ne sait pas combien ils vont dormir, il nous semble qu’ils ont épuisé leur crédit sommeil et ils dorment donc où ils veulent et le nombre de temps qu’ils veulent. Ça va se jouer sur la fraicheur de fin de course mais les sachants bon kayakiste il va falloir faire un gros bike derrière.
VTT 40 kms, vendanges tardives.
A notre réveil, Aventure évasion n’est plus là. Normal. Nous restons emmitouflés pour partir dans la longue descente de début de section. On se gèle les miches. Stéphanie et Steve gèrent l’orientation, on ne change pas une équipe qui gagne. Ça fait pas bien longtemps qu’on roule, disons 45’ et devant nous, des lumières. C’est pas des lumières de voitures, non, de la petite loupiotte de vélo, oui. On arrive sur un carrefour, Aventure évasion à l’arrêt au pied de la bosse. On passe, on appuie, c’est plié. Raph à l’air frais mais pas forcément le reste de l’équipe. On n’a pas besoin de se parler à ce moment. On sait qu’il faut rouler, sortir de leur vue. Envoyer du pâté. On n’oublie pas de rigoler quand même, surtout quand on croise une cabine téléphonique d’un autre âge dans le village d’après, ou un voilier de 7 mètres dans une mare, surveillé par un crapaud dubitatif.
Le jour se lève, si on est bon c’est notre dernier lever de soleil. Les corbières étalent leurs vignes devant nous. Les vendanges ont commencé. Et pour nous aussi quand on traverse une zone de vigne bio. On ne peut résister à la tentation de subtiliser une ou deux grappes pour se remplir la bouche tel un centurion romain en pleine orgie. Les deux derniers postes hors plaine sont coquins mais Steve a trainé ses guêtres dans le secteur et nous pilote comme si c’est lui qui avait posé le poste. On se laisse descendre entre les vignes, la chaleur est tombée, et pour ma part j’ai hâte de me défoncer les bras en kayak. Nous visitons tous les figuiers sur notre route mais la nature n’est pas généreuse cette année et les figues sont bien sèches quand elles arrivent à maturité.
Kayak 69 kms, sprint de 69 kms.
Dans notre tête à Seb et moi c’est très clair, faire une transition rapide, se jeter dans le kayak et filer avant l’arrivée d’Aventure évasion. Pas de contact visuel, la base. Nous remercions le ciel qu’il n’y ait pas une guinguette installée sur la rive, je pense qu’il aurait été difficile de convaincre Steph de ne pas s’attabler ! On fait, une fois n’est pas coutume, une assez bonne transition et on pousse les kayaks sur la berge pour embarquer. Steve et Seb sont sur l’eau, je suis encore sur la berge (à gamberger) avec Stéphanie, à jeter un regard inquiet vers le coin de rue où Aventure évasion peut surgir à tout moment. Merde on a oublié un truc dans le sac étanche, vite tout défaire, puis tout resangler. Allez allez vite !! On se met à l’eau, un dernier regard en arrière, on prend le petit rapide, on est caché, Yesssssss !! ça c’est fait. Il s’en sera fallu d’un poil, le tracking montrant bien que ça a dû se jouer dans la minute. Mais c’est comme ça, ça nous confère un gros avantage psychologique car pour une fois ils n’ont aucun repère sur nous. Maintenant il faut juste rentabiliser les nombreuses heures de kayak passées à Palamos cet été, faire le trou, bourriner, écraser de la grenouille, vider l’eau de la rivière, il faut pagayer jusqu’à ce que mort s’ensuive mais bordel il faut qu’on la garde cette putain de 5ème place !
Là, en train d’écrire en tapant à 10 doigts, j’ai la boule au ventre, le stress qui remonte, j’ai des frissons, mais en vrai c’était encore bien plus intense. On passe les premiers rapides, on profite un peu puis commence la phase de calcul. On est parti à 11h, le temps rapide c’est 13h, ça nous fait arriver à minuit donc 3 heures de nuit. Ça passssssssssse ! La même section mais tout de nuit c’est pas la même ! Faut en profiter, tout donner de jour. J’étale les cartes entre mes jambes et je compte les ponts. Ça sera nos points de repère. Les ponts et les CP. Pour le moment notre cerveau fait la chasse par derrière, il faut creuser le trou, c’est notre unique but. Un cp, deux cp. Un fan nous attend : « 40’ ! Issy n’a que 40 minutes sur vous ! » hooooo bonne mère ! (c’est plus classe que putain quand même, non ?). Pas besoin de se parler, ça envoie sévère sur l’eau, on se croirait en zodiac (c’est pas la capitale de la bosnie, ok ?). Seb s’endort. Du coup pour le réveiller on lui fait faire un petit calcul. C’est ça les mecs intelligent, dès qu’ils n’ont pas le cerveau occupé ils sombrent. J’ai pas ce problème moi. « Sachant qu’on pagaye à 7 km/h, que Issy pagaye à 5 km/h (estimation), qu’on a 40’ de retard sur eux, dans combien de temps les aura-t-on rattapé ? » Seb fume. Pas mieux pour Steve. D’ailleurs on est obligé de les accrocher, ils sont trop occupés à calculer, ils n’avancent pas assez vite. On a oublié Aventure évasion. On est sur Issy maintenant. Des loups. On est des loups.
CP31. On tire les bateaux comme des fous sur la berge pour passer la digue. Je tourne la tête à gauche et je jette le bateau plus bas. Je continue à courir vers l’eau avec le bateau en bout de sangle, Steph tracte aussi. Mon cerveau rembobine un peu, quand j’ai tourné la tête à gauche il y avait Issy, arrêté, en train de manger. Merde, ça a fait comme une image subliminale, je dois pas être tout net dans ma tête. Les deux bateaux sont à nouveau à l’eau, 4èèèèèèèèèèème !!!! Rhaaaaaa on jubile, ça nous donne le boost pour renvoyer du watt. Bon là le plan il sent bon. C’est pas du tout cuit mais presque. On est 4 parce que Issy est défoncé, on est en forme, ils ne peuvent pas revenir, c’est sûr, j’ai tout calculé : Yohann il pagaye mais il a pas les bras tendu, Lionel il est au fond du gouffre, François il nous met tout l’hiver des photos de ski de rando, il doit jamais pagayer, et Aurélie … Ben Aurélie c’est une fille donc … (désolé maman, pourtant je suis pas macho mais bon ;))
Rhaaaaa on était 9 sur la fin du premier trek, on a cru abandonner au pied des gorges de Gallamus, et là on est 4 ! Allez les enfants, au prochain pont il restera 20 kms de rivière, ça sent la fin !
On en profite pour faire dormir Seb qui préfère Morphée au beau défi qui nous attend. Alors pour ceux qui cherchent comment bien dormir dans un bateau on vous donne une bonne recette car on a tout testé : les deux bateaux attachés, c’est celui de devant du second bateau qui peut dormir, et il faut qu’il mette la tête à l’avant du bateau sinon il a toute les gouttes de la pagaie de celui de derrière qui lui tombe sur la tronche. Ok ?
« Steve, réveille Seb, ça revient derrière » … mer…credi, j’avais pas prévu ça dans mon super plan de l’espace intersidéral. « Bon ça peut pas être Issy donc c’est Aventure évasion, on va se faire croquer ! » On imagine la motiv des types qui peuvent récupérer fastoche deux places, ils doivent être survoltés ! On lâche rien. J’ai mal au grand dorsal gauche, c’est bon signe, ça veut dire que je pagaye plus technique qu’avant. Mais bon, j’ai mal quand même … Dans les bouts de ligne droite, je me retourne, ils sont là, ils ne lâchent pas, zut, crotte, flûte, qu’est ce que je peux dire à l’équipe pour les motiver ? Déjà qu’on est à fond, on peut pas aller plus à fond. Ça sent la 5ème place. En relisant les com’ sur facebook il y a celui d’Aloïs qui disait que la première des deux équipes qui se satisferait de la cinquième place aurait perdue. C’est ça, c’est exactement ça. Je me retourne, ils sont 100 mètres derrière, il reste au moins 15 bornes au total, c’est mort. Ils sont sur nous, et je reconnais Lionel et François. Ils sont vraiment fort, ils ont su trouver les ressources pour nous reprendre alors que Lionel était super mal. Non seulement grand respect mais en plus on est content que ça soit eux, la 4ème place c’est leur place. On se fait rapidement distancé et on sombre dans un faux rythme. Là il nous tarde un peu que ça finisse. La motiv est bien retombée, un peu comme la nuit est en train de faire. On croise un kayakiste qui envoie du bois. Il arrive à notre hauteur, c’est le jipé ! Anto et lui sont au dernier cp avant la mer, ils hurlent ! On arrive et on voit Issy en train de redescendre les bateaux de l’autre côté du cp. Y a rien en écart. Ça se tente. On se motive, on peut encore y croire et dès fois c’est le plus important, l’espoir, même s’il est infime. Ça permet d’avancer et d’embellir les choses. Alors on y croit. Les gens sont sur le quai et se prennent au jeu des encouragements, ils ont bien compris qu’il y avait une compétition. Devant nous les lumières d’Issy. Avec la pénombre on peine à estimer la distance mais on pagaye comme des sourds. Même Steve est sérieux. Il a peut être envie de nous faire du Bali Balo dans son berceau mais il doit avoir tellement mal aux bras, lui la machine de guerre à pied, qu’il se concentre sur son mouvement. On arrive en mer, et l’impression subite qu’il fait nuit noire. Au loin les lumières de St Pierre la mer, et le vent, ce vent de face qui nous fouette le visage, qui pousse nos pagaies au lieu de les tirer. Je ne sais pas où est Issy, on voit une lumière clignotante au loin, on s’engouffre derrière Seb et Steve et on donne tout. J’ai l’impression d’aller en ligne droite car on a aucun repère visuel nulle part. Le vent nous rabat les gouttes faites par celui de devant sur le visage, et le sel nous brûle les yeux. Déjà qu’on y voit rien mais alors avec le sel dans les yeux c’est horrible. Tous les muscles nous brûlent, faut rien lâcher, on ne sait pas où sont Issy et on n’a pas le droit de lâcher maintenant alors qu’on est à quelques encablures de la ligne d’arrivée. La côte, enfin, on a l’impression désagréable qu’elle ne s’approche jamais, qu’on pagaye pour rien. Les bouées des 300 mètres, mer.. (méditerranée) … je réalise qu’on était en pleine mer, on a rien vu, personne de l’équipe. On les franchit et le vent se calme un peu. Put…. si on avait tiré au bord de la plage dès le début on se serait facilité la tâche. Les rochers, les flammes de l’arrivée là bas, le dernier poste, on tire les bateaux, on passe la ligne … Après 69 bornes de kayak on a du mal à marcher. On se prend tous dans les bras, comme ça au moins on tombera pas ;))
Pascal arrive avec le champagne, Hoooo du calme Steve, l’en faut pour tout le monde !
Quelle équipe ! Seb je le savais, il est super costaud, surtout il ne s’énerve jamais, et puis il a un cerveau et dès fois ça sert en raid long. Mais on n’avait encore jamais couru en long avec Stéphanie (Oufti) et Steve (XTTR). Du bonheur. Bien entouré on les retrouvera certainement sur un podium mondial. Ça bouge pas en orientation, c’est ultra solide à vtt, à pied, sur l’eau. On a vécu de grands moments. Et le résultat est le fruit de chacun d’entre nous qui a apporté énormément à l’équipe. Des moments difficiles, des moments magiques, la vie d’un groupe pour qu’il ne reste que le meilleur. Le fait d’avoir été bien moins performant que d’habitude pour ma part m’a fait encore plus profité du raid. Sans la carte c’est le bonheur aussi, une autre façon de profiter. Merci à tous les trois d’avoir été aux petits soins dans les quelques heures où j’ai touché le fond. Je ne pensais pas pouvoir repartir mais on ne connait jamais ses propres ressources, et c’est vous qui les avez exhortées. Le petit roseau à plié, mais n’a pas rompu.
Une nouvelle fois un grand merci aux bénévoles car là ce n’est pas donner 3h de son temps mais une grande semaine ! Et merci à Pascal et toute ton équipe, Raid in France est unique, nul besoin d’aller à l’autre bout de la planète, tout est là, qui nous tend les bras, il fallait juste un bon chef d’orchestre pour que la symphonie soit belle.
Steph
…
« Comme il disait ces mots,
Du bout de l’horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs.
L’Arbre tient bon ; le Roseau plie.
Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu’il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine
Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts. »
Jean De La Fontaine